Nuit noire
Sur la terre pelée, ils avancent.
L’homme, la femme, puis l’enfant.
Lentement en cadence, contre le vent
Tout de noir vêtus, l’échine courbée,
Ils avancent,
Pas à pas, lentement, doucement, obstinément.
J’ai vu l’homme tomber devant moi
J’ai vu l’homme s’écrouler deux fois.
A midi, il faisait nuit noire.
Des terres intérieures, des terres brulées, des terres exilées
Ils sont venus
Quand sous un ciel plombé leur soleil s’est éteint
J’ai vu la femme tomber devant moi
J’ai vu la femme s’écrouler deux fois.
A midi, il faisait nuit noire.
Des incendies ravageurs,
Des arbres calcinés, des maisons éventrées
Leurs yeux miroirs me transpercent et me foudroient à la fois.
J’ai vu l’enfant tomber devant moi
J’ai vu l’enfant s’écrouler deux fois.
A midi, il faisait nuit noire.
Il est midi et leurs cœurs affaiblis peinent à trouver le jour.
Sous un soleil absent, desséché et meurtri
J’abandonne le blanc pour le noir.