La rupture
Tu viens de me quitter.
Ce matin, une lettre de toi me disait
Plus jamais pour finir par adieu.
Lorsque le jour est si long
Qu’il s’étend, qu’il s’étale
En grisaille sale, en noirceur de charbon,
Lorsque la nuit est si longue,
Qu’elle est triste à pleurer
En draps entortillés sur un lit d’ossements.
Lorsqu’il ne reste plus rien sous le ciel
Que solitude âcre,
Que silence d’ivoire et marbre glacé.
Alors mon cœur se serre
Prêt à exploser en éclats de diamants
En mille pointes d’acier.
Et dans le tonnerre qui s’abat sur moi
En tison de colère, en éclairs aveuglants
Je me délecte de vengeances et de caresses à la fois.
Dans mes pupilles arides d’avoir trop pleuré
Naissent des philtres d’amour, des philtres de guerre,
Des cadeaux empoisonnés, des messages de paix,
Des flèches aiguisées, des mirages de peut-être, je suis là, reviens-moi.
Mes mains raclent la terre amère et la fin des temps,
Cherchent des saveurs douces, des bonheurs éphémères
Se raccrochent au fantôme de ton corps, au souvenir d’avant
Pour calmer la violente blessure, le ventre creux dedans.
De ma gorge serrée monte un très long cri
Et dans la fougueuse lignée des femmes de mon clan
Dans le parfum des ronces épineuses
Je me dresse et martèle le sol de mes pieds déchaînés.
Je convoque la danse des monstres,
Des amours mensongères, des coups bas, des trahisons.
Je nomme la danse des morts,
Je les entends, je les comprends
J’appelle la danse des vivants
Des rythmes en cascades, des iris bondissants.
Et je danse, je danse pour calmer l’eau de mes yeux,
Illuminer mon front d’un ruban de soie rouge,
Et chasser toute ma peine
J’invoque des terres imaginaires, des terres de désir,
Des rossignols sauvages et des premières neiges.
Et je danse, je danse, je danse …